Panarabisme et Oumma arabia, parlons-en !
Par Myassa Messaoudi
« Qu’est ce que tu veux faire quand tu seras grande ? » me demandaient les adultes.
« Boumediena ! » Répondais-je fièrement. Mon père en était transi.
Les défilés militaires ont bercés mon enfance. Les discours fleuves du président Boumedienne, tantôt fiers, tantôt menaçants nous emplissaient d’orgueil et de passion. C’était à qui trouvait la meilleure réplique assignée aux anciens colonisateurs en guise de revanche postcoloniale. Tiens je vais vous en raconter une :
Un douanier français demandait à un touriste algérien combien il comptait rester en France. Et à l’algérien de lui rétorquer : « sûrement pas 132 ans ! », en référence à la durée du colonialisme qu’aucun séjour aussi prolongé soit-il ne pouvait égaler.
Il faut rappeler qu’on n’avait pas besoin de visa à l’époque, et qu’on avait même droit à un pécule en devises, offert par l’état algérien, pour nos petites dépenses.
On avait aussi le sentiment d’un pays bien gardé. Les histoires de police militaire qui embarquait les citoyens au moindre soupçon, au lieu de nous inquiéter, nous confortait dans un sentiment de sécurité qu’on ne savait pas encore chèrement payé. Tout était UN en Algérie. Nous étions arabes et musulmans. Tous ! Sans exception. L’histoire commençait à s’écrire en mode brejnévien. Déni et persécutions ont fini par définitivement nous mettre au ban des dictatures les plus répressives.
A la mort du Président Boumediene, le bal de la corruption et des détournements était officiellement ouvert.
Les autres pays arabes n’avaient pas de secret pour nous. Contrairement à nos compatriotes berbères dont on ne savait que « l’entêtement à se différencier ». Pourtant, comme la majorité des algériens, ils étaient assignés à apprendre l’arabe classique, mais aussi l'arabe égyptien, syriens, irakien, khaliji, et j’en passe ! Normal, les autorités prestes qui nous gouvernaient avaient décidé d’appliquer l’arabisation au travers du cinéma et de la chanson arabe. De facto, on mit notre culture à la case poubelle. Et on fit encore une fois, et à l’insu de « notre plein aveuglement », une colonie culturellement conquise.
Adulte, je devins spécialiste de la langue arabe. Ceci me fit rencontrer tous les protagonistes savants des pays du Moyen-Orient. Quelle fût ma surprise de découvrir qu’ils ne maitrisaient pas notre parler. Notre histoire comme nation se résumait à leurs yeux à la guerre d’indépendance, et au soutien qu’on apportait aux luttes de la région. Que, certes un flou, entachait la pureté de notre appartenance, mais qu’on était d’un tel dévouement moral et pécunier que cela passait.
Bref, que savent-ils vraiment de nous nos frères arabes ? Pas grand-chose, des banalités ! Qu’on est les pires musiciens, que nous avons le sang chaud, que notre dialecte est incompréhensible, que nous parlons plus le français. Existe bien entendu des exceptions, et nous ne sommes pas non plus sachants de leurs histoires multiethniques et confessionnelles. La complexité étant maitre mot dans l’Orient politique.
Pourquoi je vous parle de cela maintenant ? Parce que l’image d’un journalise connu de cette sœur région, posant, l’air d’une dinde farcie d’orgueil et de prétentions, au côté des responsables algériens de la perdition nationale, se vantait encore de cette Algérie dépouillée de son âme. Il venait lui offrir le soutien d’un mythe d’union qui sauverait l’honneur des filous. Cela au détriment d’un combat local pour la liberté d’expression, et en salut à des braves jetés en prison. Un tel décalage ne pouvait qu’heurter ma sensibilité, et susciter mon indignation.
Etre baladée entre des courants sectaires religieux, et un nationalisme transnational stérile, ajoute à ma détermination d’épurer les illusions criminelles quelles qu’en soient leurs destinations.
« Qu’est ce que tu veux faire quand tu seras grande ? » me demandaient les adultes.
« Boumediena ! » Répondais-je fièrement. Mon père en était transi.
Les défilés militaires ont bercés mon enfance. Les discours fleuves du président Boumedienne, tantôt fiers, tantôt menaçants nous emplissaient d’orgueil et de passion. C’était à qui trouvait la meilleure réplique assignée aux anciens colonisateurs en guise de revanche postcoloniale. Tiens je vais vous en raconter une :
Un douanier français demandait à un touriste algérien combien il comptait rester en France. Et à l’algérien de lui rétorquer : « sûrement pas 132 ans ! », en référence à la durée du colonialisme qu’aucun séjour aussi prolongé soit-il ne pouvait égaler.
Il faut rappeler qu’on n’avait pas besoin de visa à l’époque, et qu’on avait même droit à un pécule en devises, offert par l’état algérien, pour nos petites dépenses.
On avait aussi le sentiment d’un pays bien gardé. Les histoires de police militaire qui embarquait les citoyens au moindre soupçon, au lieu de nous inquiéter, nous confortait dans un sentiment de sécurité qu’on ne savait pas encore chèrement payé. Tout était UN en Algérie. Nous étions arabes et musulmans. Tous ! Sans exception. L’histoire commençait à s’écrire en mode brejnévien. Déni et persécutions ont fini par définitivement nous mettre au ban des dictatures les plus répressives.
A la mort du Président Boumediene, le bal de la corruption et des détournements était officiellement ouvert.
Les autres pays arabes n’avaient pas de secret pour nous. Contrairement à nos compatriotes berbères dont on ne savait que « l’entêtement à se différencier ». Pourtant, comme la majorité des algériens, ils étaient assignés à apprendre l’arabe classique, mais aussi l'arabe égyptien, syriens, irakien, khaliji, et j’en passe ! Normal, les autorités prestes qui nous gouvernaient avaient décidé d’appliquer l’arabisation au travers du cinéma et de la chanson arabe. De facto, on mit notre culture à la case poubelle. Et on fit encore une fois, et à l’insu de « notre plein aveuglement », une colonie culturellement conquise.
Adulte, je devins spécialiste de la langue arabe. Ceci me fit rencontrer tous les protagonistes savants des pays du Moyen-Orient. Quelle fût ma surprise de découvrir qu’ils ne maitrisaient pas notre parler. Notre histoire comme nation se résumait à leurs yeux à la guerre d’indépendance, et au soutien qu’on apportait aux luttes de la région. Que, certes un flou, entachait la pureté de notre appartenance, mais qu’on était d’un tel dévouement moral et pécunier que cela passait.
Bref, que savent-ils vraiment de nous nos frères arabes ? Pas grand-chose, des banalités ! Qu’on est les pires musiciens, que nous avons le sang chaud, que notre dialecte est incompréhensible, que nous parlons plus le français. Existe bien entendu des exceptions, et nous ne sommes pas non plus sachants de leurs histoires multiethniques et confessionnelles. La complexité étant maitre mot dans l’Orient politique.
Pourquoi je vous parle de cela maintenant ? Parce que l’image d’un journalise connu de cette sœur région, posant, l’air d’une dinde farcie d’orgueil et de prétentions, au côté des responsables algériens de la perdition nationale, se vantait encore de cette Algérie dépouillée de son âme. Il venait lui offrir le soutien d’un mythe d’union qui sauverait l’honneur des filous. Cela au détriment d’un combat local pour la liberté d’expression, et en salut à des braves jetés en prison. Un tel décalage ne pouvait qu’heurter ma sensibilité, et susciter mon indignation.
Etre baladée entre des courants sectaires religieux, et un nationalisme transnational stérile, ajoute à ma détermination d’épurer les illusions criminelles quelles qu’en soient leurs destinations.